Frères migrants qui avec nous vivez
N’ayez les cœurs contre nous ennemis
Car si pitié de nous riches avez
Paix en aurait plus tard pour tous la chance
Vous nous voyez cy apeurés à millions d’imbéciles !
Quant à l’âme que trop avons pourrie
Elle est piéça avilie et haineuse
et nous les blancs, devenus irradiés et foudre
De notre mal personne ne s’acquitte.
Prions l’inexorable que tous nous puisse aider
Si frères vous clamons pas n’en devez
avoir méfiance, quoique fûtes occis
par injustice. Toutefois vous savez
que tous hommes n’ont pas su l’adoption élire
Mourants nous sommes, âmes-sœurs délaissant,
Frères de sang ne sommes, sauf par hominicide…
Comme frères adoptifs pourrions tenter de vivre
Laissant le rêve et le rêve du Rêve
Prions les dieux qu’ils se connaissent et se confondent
Nous nous reconnaissions sans nous connaître
C’était le temps des sages et des peuples
Or la science changea le visage en faciès
et sa reconnaissance en prosopognosie
Là où croît la menace aucun dieu ne croît plus
Mais prions l’être-ni- dieu- ni -moi, « suprêmes »
Qu’un nous s’invente et se fédère si
Nous sommes tous ce que ne sommes pas
Que les langues parfaites en cela que plusieurs
fassent voler en éclats éclairants
l’identité réduite à l’ADN
Michel Deguy