Éole fut un dieu – le dieu du vent.
Renaud Camus a diffamé les éoliennes d’une page qu’Alain Finkielkraut cite dans Le Figaro du 28 août 2019. Cette diffamation ressemble plutôt à une intervention dans un « débat » sur la technique qu’à un regard d’écrivain sur les choses.
Le vent ne subit pas seulement une exploitation technique avec l’éolienne, à la façon du barrage qui débite le fleuve chez Heidegger. L’éolienne le fait aussi entendre et voir « comme un dieu » ; un moulin à vent quichottesque.
La première fois que j’en aperçus en nombre sur le plateau de la Mancha espagnole, je pensai à Cervantès : à la décision du Chevalier Triste de prendre le moulin pour un géant ; le géant qui pour Hölderlin encore est la dimension du demi-dieu « à défaut des dieux » pour les humains – comme les grands fleuves ou les grandes montagnes, le Rhin, le Danube, les Alpes, le donnent à voir.
Mauvais géant ou bon géant… écologique éologique ? Sa très haute apparition repeuple la terre de figures transfigurables ; non sans freiner la dévastation carbonifère et la déforestation. « Forêt de symboles » ? Ça ne suffit pas. Il y a trop de symboles aujourd’hui. L’Éolienne appelle les arbres à pousser (« phueïn » grec) plutôt qu’à « symboliser » la destruction.
Quant aux avions, ils n’ont qu’à les éviter – et les admirer en-dessous à la fenêtre.
Michel Deguy