« Les musées sont des lieux de démocratisation inclusifs et polyphoniques, dédiés au dialogue critiques sur les passés et les futurs. » Puis : « Ils sont dépositaires d’artefacts et de spécimens pour la société. » Leurs fonctions : « Ils sont participatifs et transparents, et travaillent en collaboration actives avec et pour diverses communautés afin de collecter, préserver, interpréter, exposer, et améliorer les compréhensions du monde. » Leur objectif : « Contribuer à la dignité humaine et à la justice sociale, à l’égalité mondiale et au bien-être planétaire. » […] La Danoise Jette Sandahl, qui a créé le Musée de la femme au Danemark et le Musée des cultures du monde à Göteborg, en Suède, a dit en août que l’ancienne définition « ne parle pas le langage du XXIe siècle » et qu’elle doit être « historicisée, contextualisée, dénaturalisée et décolonialisée. »[1]
Le Sens de la Visite a muté.
La Querelle des Anciens et des Modernes, fondatrice de la tradition depuis le XVIIe siècle (Pascal ; Perrault), qui renversa la loi de Longin (dit « le pseudo ») en renonçant au dogme de l’Inimitable des inégalables Anciens et prônant la nouvelle mimésis des Modernes, est à son tour défunte.
Ce qui est intellectuellement « correct » vient d’être promulgué par le Conseil international des Musées (ICOM dans le langage du XXIe siècle).
L’époque de l’Art — appelée « poésie » dans la pensée occidentale — « institutrice du genre humain » (Vico ; Hölderlin, et alii) est close. Le système de l’Éducation et l’économie du tourisme mondialisé, en la refermant amnésiquement, en euthanasieront bientôt la mémoire[2]. Même l’esprit de la fin-de-l’Art philosophé par Hegel est « chose du passé ». L’Esthétique est refermée. Il ne s’agit plus du Beau et de son expérience éducable dans l’élément de la parole pensive — « rhétorique », c’est-à-dire antérieure à la réduction du discours aux « éléments de langage ».
Le phénomène culturel, en tant que « phénomène social total » au sens de Marcel Mauss, est irréversible : aveuglant sauf pour les aveugles[3]. Le culturel dans son ensemble est lui-même un mode de la mutation globale du « sociétal » : césure d’un sans-précédent ou « Disruption » dans le lexique de Bernard Stiegler.
Notons que les lieux de provenance (ou « émission ») de la correction sont européens, toujours — par exemple scandinaves.
Fin du peu-visible du poème ; dicible dans l’élément du parler des langues et des entretiens des « muses ». Fin de la relation « musaïque » des Arts dans l’élément de la philologie (« logos »)… et non pas de la communication/information (« .com »).
« C’était mieux avant ? » Je ne répondrai pas oui : mais tout autre. Pour y revenir longuement la prochaine fois.
Michel Deguy